Retrouvez mon discours prononcé lors de la convention régionale de la Fédération Hospitalière de France Hauts-de-France le 9 décembre dernier
L’HÔPITAL PUBLIC EST SOUMIS À DE VIVES CRITIQUES
Nous serions lents à nous réorganiser, dépensiers, inefficaces, peu performants.
Je ne le pense pas… au contraire ! Dans la vague de réformes que nous connaissons depuis quelques années et auxquelles nous nous adaptons sans cesse, nous devons réaffirmer haut et fort que prendre soin des malades passe aussi par prendre soin des soignants. Utiliser l’hôpital comme variable d’ajustement se fera inévitablement au détriment de la prise en charge des patients, des conditions de travail du personnel et des valeurs que nous défendons. Car l’hôpital public est au cœur du modèle de service public et de solidarité nationale que nous souhaitons préserver.
Ce que je viens d’exprimer pour le sanitaire, je peux en faire un copier-coller sur les EHPAD et Maisons de retraite. Après plusieurs années vertueuses, ayant permis de transformer les établissements et de les accompagner vers la médicalisation, les EHPAD ont aujourd’hui des effectifs exsangues, les conditions de travail y sont difficiles, le climat social est dégradé et explosif.
Dans tous nos établissements publics, la confiance commence à être atteinte : chez les médecins, le personnel soignant et non médical mais aussi chez les directeurs.
Le risque social est fort, effets psycho-sociaux et burn-out s’aggravent.
LA TARIFICATION À L’ACTE : UN MODÈLE ÉCONOMIQUE À BOUT DE SOUFFLE
La régulation « prix-volume » mise en place avec la tarification à l’acte (T2A) épuise les hospitaliers. Les économies structurelles souhaitées par le gouvernement ne peuvent avoir des effets financiers immédiats.
Les effets pervers de ce mécanisme, notamment son caractère inflationniste sur les actes, sont maintenant décriés par tous. Il faut avoir le courage politique d’y apporter des amendements significatifs. C’est ce que nous demandons.
En 2017, les établissements de santé ont non seulement respecté l’Objectif national des dépenses assurance maladie (Ondam), ils l’ont aussi sous-exécuté à hauteur de 80 millions d’euros. Nous sommes en droit d’attendre le dégel en fin d’année de l’intégralité des crédits mis en réserve.
La situation financière des établissements publics de santé (EPS) se dégrade. L’activité s’essouffle et ne compense pas la baisse des tarifs, ni les gels et les mises en réserve, ce qui entraîne un décrochage pour certains établissements avec – phénomène nouveau – un risque de rupture de gestion.
Le déficit est estimé à 110 millions d’€ pour les hôpitaux publics de la région, d’où notre alerte générale.
LA FHF HAUT-DE-FRANCE, « LANÇEUSE » D’ALERTE
Aujourd’hui, nous lançons cette alerte parce que :
L’état de santé de la population est significativement plus dégradé dans notre région qu’ailleurs en France.
L’offre hospitalière reste fragile. Je tiens à souligner les effets pervers des débauchages parfois agressifs de nos praticiens par les structures privées commerciales. La cardiologie, l’anesthésie-réanimation, la médecine d’urgence, la psychiatrie, la pneumologie et la gastro-entérologie sans parler de l’ophtalmologie et maintenant de la gériatrie sont des spécialités déficitaires au niveau des établissements public. Nous connaissons un déficit historique de personnel Hospitalo-Universitaire dans les deux CHU de la région.
Nous formons des étudiants dans la région, mais y restent-ils ? Il nous faut rapidement lancer une réflexion globale et prospective pour favoriser l’adéquation des besoins de formation aux besoins des territoires.
Les besoins à satisfaire seront plus importants dans les années à venir.
L’effort doit être porté sur l’ambulatoire et le domicile pour éviter l’hospitalo- centrisme qui sollicite toujours plus l’hôpital pour faire des économies.
La politique publique de santé doit partir de l’état de santé de la population et de l’analyse de ses besoins et non uniquement de l’offre existante et de ses corollaires.
NOUS SOUHAITONS RESTER PERFORMANTS, SOLIDAIRES ET INNOVANTS.
Une nouvelle page s’est ouverte en 2016 avec la mise en place de 14 Groupements hospitaliers de territoire (GHT), donnant corps à la stratégie de groupe public que nous appelons de nos vœux depuis de nombreuses années.
Les projets médicaux de territoire devront favoriser les complémentarités et les solidarités médicales entre établissements. Pas pour diminuer l’offre de soins mais pour la réorganiser en bonne intelligence. Le projet d’imagerie médicale présenté lors de cette convention régionale par le Pr Jean-Pierre PRUVO en constitue un puissant exemple.
Le parcours est mis en avant : celui des patients mais aussi celui des professionnels. Notre rôle préventif et aujourd’hui méconnu. Nous devrons le développer afin d’adapter notre système de santé à l’émergence et au suivi des maladies chroniques.
Je suis conscient qu’une période d’adaptation est nécessaire. Nous n’en sommes qu’au début.
Nous attendons du législateur qu’il ne de génère pas de crispations entre établissements et qu’il accompagne cette adaptation afin de sécuriser l’ensemble des acteurs